Comment tu m'as fait ? J'suis pas beau !

L'abbé Emmanuel Canart répond à une question de jeune.

 

Comment tu m’as fait, j’suis pas beau ?

 

DSCF0039 DSCF0039  Ceux de mon âge ou les fans de Souchon reconnaissent les paroles de cette chanson… « allo maman bobo ». Elle date, bien sûr, mais que de fois j’ai entendu ou deviné cette question sur les lèvres de jeunes et de moins jeunes. ;

Parfois, elle devient même tragique « pourquoi je vis ? »

Voici juste quelques réflexions, quelques phrases glanées de ci de là. Sans prétendre aucunement répondre à toutes ces questions si difficiles.

 

Comme croyant, j’ouvre ma Bible et je relis les toutes premières pages, celle de la genèse… Une parabole m’explique non pas comment le monde s’est créé (il ne s’agit pas d’un documentaire de Coustaud) mais pourquoi Dieu a créé le monde. J’y lis que Dieu a créé le monde par ordre (qu’il y ait les luminaires, qu’il y ait la mer etc…). Mais je remarque que Dieu s’y prend autrement pour donner vie à l’homme : « Faisons l’homme et la femme » Genèse 1,26. Ce n’est plus un ordre qui nous donne vie ! Le récit de la création du monde nous fait comprendre que  nous sommes nés d’une réflexion de Dieu en lui-même. J’en déduis que notre vie n’est pas un hasard mais que nous avons été voulus par Dieu, que nous sommes nés du désir de Dieu.

J’aime Goldman… mais il écrit dans l’une de ses premières chansons : « ma vie, tout le monde aurait si bien pu s’en passer » ! Je pense que là, il se trompe… Ta vie, personne ne pourrait s’en passer ! en tous cas, Dieu ne pourrait pas s’en passer.

J’assistais à une conférence au cours de laquelle un prêtre expliquait cela. Un jeune est intervenu pour crier : « mes parents m’ont dit que j’étais un accident »…. Parole terrible à laquelle le prêtre a répondu : « même si tes parents ne t’ont pas désiré, Dieu t’a désiré ».

 

De beaux passages de la Bible redisent cela à leur façon.

Le prophète Isaïe, au chapitre 63 : « Et cependant Yavhé (Seigneur), tu es notre père. Nous sommes l’argile et tu es le potier »

Et saint Paul : « Dieu nous a choisis en Lui avant la fondation du monde » (épître aux Ephésiens 1,4)

 

            J’aime aussi ce très beau psaume (138/9) qui dit que Dieu sait tout de nous ! La moindre pensée, le moindre geste … tout lui est connu… Qu’un seul mot parvienne à nos lèvres et déjà le Seigneur le sait… parfois un peu gênant d’être aussi transparent pour Dieu. Et le psalmiste (celui qui a écrit cette prière) conclut : « je reconnais la merveille que je suis » !!!

Quelle audace qui ne cache aucun orgueil. On comprend que le psalmiste n’affirme pas cela au nom de ses mérites personnels mais parce qu’il se sait créé par Dieu, à l’image de Dieu et que Dieu le trouve réussi (Genèse 1,31 « c’est très bon »). Rares sont les mamans qui, en regardant leur nouveau-né s’écrient : «il est à mon image, il me ressemble, il est vraiment laid ! »….

 

            Bien sûr, l’image de Dieu en nous est parfois abîmée… ternie… Mais je ne peux oublier ces mots d’un jésuite, Teilhard de Chardin (dans « Etre plus ») :

« Ne t’inquiète pas de la valeur de ta vie, de ses anomalies, de ses déceptions, de son avenir plus ou moins obscur et sombre. Tu fais ce que Dieu veut. .. Peu importe que dans l’intime de toi-même tu sentes, comme un poids naturel, la tendance à se replier sur les tristesse et tes défauts… Peu importe que, humainement, tu te trouves « raté » si Dieu, lui, te trouve réussi, à son goût. …. Tout ce qui te rétrécit et t’agite est faux, au nom des lois de la vie, au nom des promesses de Dieu… Quand tu te sentiras triste… adore et confie toi ».

 

            Je pourrais également citer saint Augustin « Aime-moi tel que tu es. Je connais ta misère, les combats et les tribulations de ton âme …je te dis quand même : « Donne-moi ton cœur, aime-moi tel que tu es. Si tu attends d’être un ange pour te livrer à l’Amour, tu ne m’aimeras jamais ».

 

            Un conte et une prière pour terminer même s’il y aurait beaucoup de chose à évoquer, notamment le sacrement de réconciliation (ce sera pour une autre fois !)

 

            Le conte qui se déroule en Inde où, dit-on, les animaux sont souvent des hommes réincarnés pour apurer leur souris souris  karma. Une souris vint se plaindre à Brahma, le dieu des dieux : « j’ai peur des chats… transforme-moi, je t’en prie, en chat ! » Et le Brahma la transforma en chat. Mais alors, elle eut peur du tigre. Le tigre, sous cette incarnation, avait peur du chasseur. Brahma le transforma en chasseur. Mais le chasseur, mal dans sa peau, aurait aimé être une femme. Brahama le transforma en femme. Laquelle eut alors peur d’une souris…. Et Brahma en souriant dit à la petite souris : « tu vois, sois une vraie souris, et alors tu apprendras à vivre sans peur… »

 

              La prière ? Elle est de Michel Quoist et je pense qu’on pourrait tous la réciter chaque jour !

 

            « Je te demande ce soir, Seigneur, de me débarrasser une bonne fois pour toutes de mon souci de paraître.


Pardonne-moi d’être trop préoccupé de l’impression que je donne,

de l’effet que je produis,

de ce qu’on pense et dit de moi.
Pardonne-moi de vouloir ressembler aux autres en oubliant d’être moi-même,

d’envier leurs qualités en oubliant de développer les miennes.

 

Pardonne-moi le temps passé à jouer mon personnage

 

Donne-moi au contraire, de mourir à l’étranger que j’étais pour qu’enfin je puisse naître à moi-même.

Car je ne connaîtrai jamais ma maison si je refuse d’en sortir,

Je ne me trouverai pas si je refuse de me perdre.

 

Accorde-moi, enfin, d’être tout grand ouvert à mes frères.
Alors, tu pourras par eux, Seigneur, venir chez moi comme chez ton ami,

Et de moi, tu feras cette « personne » dont tu rêves en ton amour,

Car je serai ton fils, o Père, et un frère pour mes frères »

 

C’est ce que je souhaite à chacun en cette fête de Pâques !

 

Abbé Emmanuel Canart

emmanuel.canart@wanadoo.fr

           

 

 

 

 

 

 

 

Publié le Vendredi 25 mars 2005 • 12740 visites